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    Je veux mourir pour tes beautés, Maîtresse

    Je veux mourir pour tes beautés, Maîtresse,
    Pour ce bel oeil, qui me prit à son hain,
    Pour ce doux ris, pour ce baiser tout plein
    D'ambre et de musc, baiser d'une Déesse.

    Je veux mourir pour cette blonde tresse,
    Pour l'embonpoint de ce trop chaste sein,
    Pour la rigueur de cette douce main,
    Qui tout d'un coup me guérit et me blesse.

    Je veux mourir pour le brun de ce teint,
    Pour cette voix, dont le beau chant m'étreint
    Si fort le coeur que seul il en dispose.

    Je veux mourir ès amoureux combats,
    Soûlant l'amour, qu'au sang je porte enclose,
    Toute une nuit au milieu de tes, bras.

    par Pierre de Ronsart 

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    Dernière soirée passée avec ma maîtresse

    Il fallait la quitter, et pour ne plus me voir
    Elle partait, mon Dieu, c'était le dernier soir.
    Elle me laissait seul ; cette femme cruelle
    Emportait mon amour et ma vie avec elle.
    Moi je voulus encore errer comme autrefois
    Dans les champs et l'aimer une dernière fois.
    La nuit nous apportait et l'ombre et le silence,
    Et pourtant j'entendais comme une voix immense,
    Tout semblait animé par un souffle divin.
    La nature tremblait, j'écoutais et soudain
    Un étrange frisson troubla toute mon âme.
    Haletant, un moment j'oubliai cette femme
    Que j'aimais plus que moi. Le vent nous apportait
    Mille sons doux et clairs que l'écho répétait.
    Ce n'était plus de l'air le calme et frais murmure,
    Mais c'était comme un souffle étreignant la nature,
    Un souffle, un souffle immense, errant, animant tout,
    Qui planait et passait, me rendant presque fou,
    Un son mystérieux et qui, sur son passage,
    Réveillait et frappait les échos du bocage.
    Tout vivait, tout tremblait, tout parlait dans les bois,
    Comme si, pour fêter le plus puissant des rois,
    Et l'insecte et l'oiseau et l'arbre et le feuillage
    Parlaient, quand tout dormait, un sublime langage.
    Je restai frémissant : ce bruit mystérieux,
    C'était Dieu descendu des cieux.

    C'était ce Dieu puissant si grand et solitaire
    Qui venait oublier sa grandeur sur la terre.
    Dieu las et fatigué de sa divinité,
    Las d'honneur, de puissance et d'immortalité,
    Des éternels ennuis où sa grandeur l'enchaîne,
    Qui venait partager notre nature humaine.
    Il avait choisi l'heure où tout dort et se tait,
    Où l'homme, indifférent à tout ce que Dieu fait,
    Attaché seulement à ses soins mercenaires,
    Prend un peu de repos qu'il dérobe aux affaires.
    Car c'était aussi l'heure où ce Dieu généreux
    Peut bénir et donner la main aux malheureux,
    L'heure où celui qui souffre et gémit en silence,
    Qui craint pour son malheur la froide indifférence,
    Délivré du fardeau de l'égoïsme humain,
    Sans craindre la pitié peut planer libre enfin.
    Dieu vient le consoler, il soutient sa misère,
    Il rend ses pleurs plus doux, sa douleur moins amère,
    Il verse sur sa plaie un baume bienfaisant.
    D'autres craignent encore un oeil indifférent,
    Et les regards de l'homme et les bruits de la terre.
    Ils cherchent aussi l'heure où tout est solitaire,
    Dieu les voit, il bénit le bonheur des amants.
    Invisible témoin, il entend leurs serments.
    Il aime cet amour qu'il ne goûtera pas
    Et dans les bois, la nuit, il protège leurs pas.
    Il était là, son souffle errait sur la nature,
    Paraissait éveiller comme un vaste murmure,
    Tout ce qu'il a formé s'animait et, tremblant,
    S'agitait au contact de ce Dieu tout-puissant,
    Et tout parlait de lui, le vent sous le feuillage,
    Et l'arbuste, et le flot caressait le rivage,
    Et tous ces bruits divers ne formaient qu'une voix :
    C'était Dieu qui parlait au milieu des grands bois.
    Tous deux nous l'écoutions et nous versions des larmes ;
    Quand on va se quitter, l'amour a tant de charmes !
    Et nos pleurs, qui tombaient comme des diamants,
    Goutte à goutte brillaient sur les herbes des champs.
    Mais de cette belle soirée
    Et de ma maîtresse adorée
    Que restait-il le lendemain ?
    Seul le pâtre de grand matin,
    En conduisant au pâturage
    Son gras troupeau, vit sur l'herbage
    Les quelques gouttes de nos pleurs,
    Seule marque de nos douleurs ;
    Mais il les prit pour la rosée.
    "L'herbe n'est point encor séchée",
    Se dit-il en pressant le pas.
    Hélas ! il ne soupçonna pas
    Que de chagrins et de misères
    Cachait cette eau sur les bruyères.
    Et ses brebis qui le suivaient
    Broutaient les herbes et buvaient
    Nos pleurs sans arrêter leur course,
    Mais rien n'en a trahi la source.



    par Guy de Maupassant (1868)

      

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    Aimons toujours ! Aimons encore !

    Aimons toujours ! Aimons encore !
    Quand l'amour s'en va, l'espoir fuit.
    L'amour, c'est le cri de l'aurore,
    L'amour c'est l'hymne de la nuit.

    Ce que le flot dit aux rivages,
    Ce que le vent dit aux vieux monts,
    Ce que l'astre dit aux nuages,
    C'est le mot ineffable : Aimons !

    L'amour fait songer, vivre et croire.
    Il a pour réchauffer le coeur,
    Un rayon de plus que la gloire,
    Et ce rayon c'est le bonheur !

    Aime ! qu'on les loue ou les blâme,
    Toujours les grand coeurs aimeront :
    Joins cette jeunesse de l'âme
    A la jeunesse de ton front !

    Aime, afin de charmer tes heures !
    Afin qu'on voie en tes beaux yeux
    Des voluptés intérieures
    Le sourire mystérieux !

    Aimons-nous toujours davantage !
    Unissons-nous mieux chaque jour.
    Les arbres croissent en feuillage ;
    Que notre âme croisse en amour !

    Soyons le miroir et l'image !
    Soyons la fleur et le parfum !
    Les amants, qui, seuls sous l'ombrage,
    Se sentent deux et ne sont qu'un !

    Les poètes cherchent les belles.
    La femme, ange aux chastes faveurs,
    Aime à rafraîchir sous ses ailes
    Ces grand fronts brûlants et réveurs.

    Venez à nous, beautés touchantes !
    Viens à moi, toi, mon bien, ma loi !
    Ange ! viens à moi quand tu chantes,
    Et, quand tu pleures, viens à moi !

    Nous seuls comprenons vos extases.
    Car notre esprit n'est point moqueur ;
    Car les poètes sont les vases
    Où les femmes versent leur coeurs.

    Moi qui ne cherche dans ce monde
    Que la seule réalité,
    Moi qui laisse fuir comme l'onde
    Tout ce qui n'est que vanité,

    Je préfère aux biens dont s'enivre
    L'orgueil du soldat ou du roi,
    L'ombre que tu fais sur mon livre
    Quand ton front se penche sur moi.

    Toute ambition allumée
    Dans notre esprit, brasier subtil,
    Tombe en cendre ou vole en fumée,
    Et l'on se dit : " Qu'en reste-t-il ? "

    Tout plaisir, fleur à peine éclose
    Dans notre avril sombre et terni,
    S'effeuille et meurt, lis, myrte ou rose,
    Et l'on se dit : " C'est donc fini ! "

    L'amour seul reste. O noble femme
    Si tu veux dans ce vil séjour,
    Garder ta foi, garder ton âme,
    Garder ton Dieu, garde l'amour !

    Conserve en ton coeur, sans rien craindre,
    Dusses-tu pleurer et souffrir,
    La flamme qui ne peut s'éteindre
    Et la fleur qui ne peut mourir !

    par Victor Hugo Mai 18...   

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